Bref tour du monde des politiques cannabis et attentisme belge

juillet 2019

Après l’alcool et le tabac, le cannabis est la drogue la plus consommée dans le monde. Après des années de prohibition, les choses changent. Dès 2013, l’Uruguay choisit de reprendre le contrôle sur le cannabis et en proposant de réguler le cannabis via 3 canaux :

  • la vente en pharmacie,
  • les cannabis social clubs
  • l’auto-culture.

Plusieurs états des États-Unis ont également suivi, souvent après avoir décriminalisé le cannabis thérapeutique. Sans véritable surprise, le modèle libéral prédomine souvent : l’État délivre des licences à des acteurs privés qui se chargent de vendre (et de promouvoir) leur produit. Un business comme un autre… Depuis 2018, remettant en question le rôle de la justice criminelle dans la gestion des drogues, le Canada a également opté pour une régulation du cannabis, tout en veillant à mieux investir dans le champ de la santé, de la prévention à la prise en charge des assuétudes.

Et en Europe ? Depuis les années 1970, aux Pays-Bas, il existe une forme de tolérance à l’égard des consommateurs de cannabis et de la vente de cannabis dans les coffee-shops, mais l’approvisionnement de ces derniers est, quant à lui, illégal et repose sur marché noir. Pour remédier à cette situation, le gouvernement batave envisage de débuter prochainement des projets pilotes proposant une filière entièrement légale et contrôlée.

Au Grand-Duché du Luxembourg, le gouvernement actuel travaille à la création d’un cadre légal pour le cannabis récréatif. Ce sera une première en Europe !

En Espagne, l’auto-culture et la consommation sont autorisées dans la sphère privée ; devant le développement des Cannabis social clubs, la région catalane a souhaité mieux encadrer le fonctionnement de ces coopératives censées être non lucratives.

En Suisse, le Conseil fédéral vient d’autoriser plusieurs projets pilotes, sur des modèles différents, afin de « créer une base légale pour acquérir de nouvelles connaissances scientifiques » sur la consommation de cannabis, avant d’envisager une régulation au niveau fédéral. La Commission fédérale pour les questions liées aux addictions recommande d’ores et déjà d’adapter la loi sur les stupéfiants et de réglementer sans tarder le marché du cannabis récréatif.

Le cannabis est également à l’avant-plan dans d’autres pays. En Nouvelle-Zélande, un référendum se tiendra dans quelques mois sur l’opportunité de réguler le cannabis. Aux Caraïbes, la Communauté caribéenne va proposer un modèle pour la légalisation du cannabis récréatif aux états qui en sont membres. En Afrique du Sud et au Mexique, c’est la justice qui a tranché. Elle estime que la consommation de cannabis, chez les adultes, relève de la liberté de chacun et que le cadre prohibitionniste était disproportionné.

Tous les pays sont confrontés à une même réalité : le cannabis est un produit largement consommé et les lois interdisant son commerce et sa consommation sont inefficaces, inapplicables ou inappliquées. Régler permettrait de reprendre le contrôle sur le marché du cannabis, de limiter ou restreindre son accès (auprès des jeunes notamment), de mener une politique de santé plus efficace (prévention, réduction des risques, contrôle de qualité), ainsi que restreindre les ressources des réseaux criminels.

Dans un tel contexte, l’attentisme belge n’est pas une option satisfaisante. Attendre, c’est

  • laisser le marché noir développer de nouvelles stratégies : vente par internet, sur les réseaux sociaux, livraisons à domicile, promotion, call centers…
  • laisser les investisseurs et les lobbyistes préparer une légalisation ultra libérale, sur le modèle du tabac et de l’alcool, au mépris de la santé publique.

C’est maintenant qu’il faut envisager de travailler cette question, en concertation avec la société civile et toutes les parties prenantes (santé, prévention, éducation, assuétudes,…).