Pratique innovante, la pair-aidance vise à intégrer le savoir expérientiel dans les dispositifs psycho-médico-sociaux, à travers la participation d’anciens bénéficiaires d’aide et de soins au service des équipes. L’intégration de ces pair-aidants dans les équipes ne va pas sans poser des difficultés auxquelles le service Peer and support Team (PAT) du Smes essaye de répondre en offrant des formations à la pair-aidance, un accompagnement des organisations qui décident de franchir le pas et des intervisions à destination des pair-aidants. Aurélien Vitiello, membre de ce service en explique le fonctionnement.
C’est sans doute l’expérience du rétablissement qui compte le plus dans la pair-aidance.
Il est indispensable que ces fonctions soient considérées comme « en plus » et pas « à la place de ».
Prospective Jeunesse : Quel est l’intérêt pour des dispositifs psycho-médico-sociaux d’intégrer des pair-aidants ?
Aurélien Vitiello : Pour des services travaillant avec un public vulnérable, l’intégration de pair-aidants permet de se rapprocher des réalités de ce public. Les personnes ayant eu un parcours de vie en rue, de consommation ou psychiatrique peuvent en effet témoigner de leur vécu et, par leur parcours de rétablissement, donner espoir en un avenir meilleur, accompagner les personnes fragilisées et améliorer leur prise en charge. Si je devais résumer le rôle du pair-aidant, c’est probablement le terme de créateur de liens ou de traducteur qui conviendrait le mieux : notre force, c’est de pouvoir parler à la fois le langage de l’institution et celui des usagers, ce qui permet de mieux travailler la question centrale des émotions.
Il y a aussi un rôle de transfert de connaissances et de diffusion des bonnes pratiques qui n’est pas à négliger. Les pratiques professionnelles sont en effet très ancrées dans chaque institution, et parfois difficiles à faire évoluer, alors même que la recherche avance et que des nouvelles pratiques positives peuvent émerger dans de nouveaux lieux sans pour autant être diffusées. Le vécu du pair-aidant peut aider à un transfert de compétences entre institutions.
Et puis, c’est sans doute l’expérience du rétablissement qui compte le plus dans la pair-aidance : c’est elle qui a évidemment le plus de pouvoir d’entraînement vis-à-vis de l’usager dans la mesure où elle donne une incarnation concrète d’un futur possible.
PJ :Du point de vue du pair-aidant, quelles sont les principales difficultés rencontrées dans l’exercice de ses missions ?
C’est évidemment la question de la distance qui est la plus épineuse et que nous travaillons le plus dans les formations. Notre apport réside évidemment dans la proximité des vécus et dans l’empathie qui peut en découler, mais il faut prendre garde à ne pas être noyé par cette empathie. Un des éléments principaux à apprendre dans ce rôle, c’est donc de garder cette proximité au vécu des bénéficiaires sans qu’elle ne se retourne contre le pair-aidant. D’un point de vue institutionnel, il va de soi que tout ce travail autour de la tension entre proximité et distance interroge les pratiques de chacun individuellement, et de l’équipe collectivement.