Pauvreté rurale et urbaine en Belgique, rapide coup d’œil sur leurs différences

mars 2018

Xavier May a extrait pour Prospective Jeunesse les éléments saillants de la pauvreté rurale belge. Outre les taux de pauvreté, il relève les différences en terme de profils et d’équipements (logement, voiture, gsm) entre les urbains et les ruraux.

Il est connu que la pauvreté ne se décline pas de la même manière selon que l’on habite en ville ou à la campagne. En milieu rural, les logements sont moins chers, mais le parc locatif est restreint et, de manière générale, l’accessibilité aux services et aux emplois est moins bonne (manque de transports publics, éloignement des écoles et des commerces…). On est donc souvent contraint de posséder son propre véhicule, ce qui peut lourdement peser sur les finances du ménage.

Pour étudier la pauvreté rurale et ses spécificités, il est indispensable de définir au préalable ce qu’est le rural. En effet, le concept de ruralité est couramment utilisé mais n’est, en réalité, pas aisé à mettre en œuvre. Comment séparer le rural du reste du territoire et à quelle échelle spatiale travailler ? Beaucoup de typologies de l’espace sont réalisées par commune, mais cette échelle n’est pas satisfaisante : même dans une commune considérée comme rurale, il y a une grande différence entre vivre au centre d’une commune et les franges les plus périphériques (qui sont parfois extrêmement isolées) en termes d’accès aux services et aux emplois.

Dans le cadre d’une étude financée par le SPF Politique scientifique1, l’échelle des anciennes communes, qui est beaucoup plus fine², a été privilégiée. La typologie élaborée est basée sur l’appréciation des services locaux par les ménages, l’accessibilité en transports en commun, le rayonnement des pôles commerciaux de l’entité, le degré d’artificialisation³ et le coût du logement. Au final, l’espace a été divisé en 6 catégories : l’urbain dense, l’urbain, l’intermédiaire, le rural avec foncier élevé, le rural et le rural profond.

« Le monde rural se distingue particulièrement par une pauvreté encore plus répandue parmi les ménages monoparentaux »

Sur base de ce découpage territorial, les espaces urbains denses comportent la part la plus élevée de ménages pauvres tandis que les ménages qui résident en milieu rural (en gris foncé sur la carte) occupent la seconde place. Ce sont dans les espaces urbains (en mauve foncé sur la carte) et enfin ceux des espaces intermédiaires (en mauve clair sur la carte) qui comportent le moins de ménages en situation précaire.

Par contre, il semble que la pauvreté la plus intense soit moins présente en milieu rural. En effet, lorsqu’on considère les 10 % des ménages les plus pauvres en Belgique, ceux-ci sont sous-représentés en milieu rural. En revanche, si on considère une définition un peu moins restrictive de la pauvreté et qu’on s’intéresse aux 15 % des ménages les plus pauvres, la situation du monde rural est nettement moins favorable : les ménages un peu moins pauvres (c’est-à-dire ceux compris entre les 10 et les 15 % des plus pauvres) sont surreprésentés dans le monde rural.

En termes de taux de pauvreté, le monde rural se distingue particulièrement par une pauvreté encore plus répandue parmi les ménages monoparentaux que dans les autres types d’espace. En revanche, ces taux sont beaucoup plus faibles pour les moins de 25 ans en milieu rural que dans les centres-villes.

En termes qualitatifs, les ménages pauvres des centres urbains denses ont tendance à limiter leur consommation plutôt qu’à s’endetter. La fréquence des ménages moins bien équipés y est donc plus grande : ils ont moins souvent un téléphone, un GSM, un ordinateur, l’internet ou une voiture, que les autres ménages pauvres. Les logements sont souvent plus petits et, de ce fait, ce poste pèse souvent moins sur les finances du ménage.

Dans le rural, la part des ménages pauvres qui bénéficient plus souvent de logements de grande taille est la plus élevée. Celle des ménages bien équipés est sensiblement plus grande que la moyenne (PC, internet, GSM, ligne fixe et voiture). Il est effectivement plus difficile de se passer de ces équipements à la campagne qu’en ville, où il existe davantage d’alternatives (wasserettes, phone shops, transports publics…).

 » [En milieu urbain,] les logements sont souvent plus petits et, de ce fait, ce poste pèse souvent moins sur les finances du ménage. « 

1. Marissal P., May X., Mesa Lombillo D., (2012), Pauvreté rurale et urbaine, SPF Politique Scientifique Fédérale, http://www.luttepauvrete.be/publicationsrecherche.htm

2. La Belgique compte 589 communes et 2652 anciennes communes qui correspondent généralement aux anciens noyaux villageois.

3. L’artificialisation est la modification humaine du sol naturel : bétonisation, tallus routiers, construction immobilière…