Nouveau calendrier scolaire: enfin une réforme qui tient compte de l’intérêt de l’enfant en premier lieu

juin 2022

Interview de Morgane Eeman réalisée par Edgar Szoc

Si la réforme du calendrier scolaire que la Fédération Wallonie-Bruxelles opère cette année a déjà fait couler beaucoup d’encre, ce sont principalement les parents et le corps enseignant qui ont été entendus sur le sujet. Mais qu’en est-il de l‘extrascolaire, que les changements vont tout autant affecter ?

Prospective Jeunesse : Pouvez-vous tout d’abord présenter les grandes lignes de la réforme des rythmes scolaires ?

Morgane Eeman : Elle est très simple à résumer. L’année scolaire va s’étendre au sein du calendrier civil pour commencer le dernier lundi d’août et se terminer le premier vendredi de juillet. À l’intérieur de cette plage élargie, c’est désormais le principe d’une alternance entre sept semaines d’enseignement et deux semaines qui va s’appliquer – d’où découle un allongement d’une semaine du congé d’automne (Toussaint) et de détente (Carnaval). Cette révision s’applique uniformément et de manière synchronisée à l’ensemble de l’enseignement obligatoire, tous niveaux et types confondus. Elle n’a enfin pas d’impact sur le nombre de jours scolaires qui restera en moyenne de 182 par an (entre 180 et 184).

P.J. : Comment a-t-elle été accueillie par le secteur extrascolaire ?

M.E. : Il est important de souligner que c’est une décision qui a été prise exclusivement dans l’intérêt des enfants – et à partir de là, dans celui des équipes pédagogiques et de l’extrascolaire. C’est finalement assez rare pour être souligné. De nombreuses études ont montré, depuis longtemps, que cette alternance de sept semaines d’enseignement et deux semaines de congé était la plus conforme au développement des enfants et à leurs phases de concentration. La philosophie qui la sous-tend nous paraît donc fondamentalement bonne. Ceci dit, comme toute réforme, elle implique son lot de difficultés de mise en œuvre. On a bien sûr beaucoup entendu parler des difficultés organisationnelles que ce changement posait aux familles dont les enfants ne fréquentent pas le même système d’enseignement, mais ces cas sont numériquement relativement réduits. Et surtout, on peut espérer que la décision de bon sens de la Fédération Wallonie-Bruxelles inspirera la Flandre prochainement.

P.J. : Quelles sont les principales difficultés que le changement impliquera pour le secteur extrascolaire ?

M.E. : À court terme, le principal problème à régler sera celui du personnel : le secteur extrascolaire connaissait déjà un problème de pénurie de personnel. Ce problème sera encore accru du fait de la non-coïncidence des calendriers de l’enseignement obligatoire et de l’enseignement supérieur. Beaucoup d’étudiants du supérieur font en effet partie des volontaires ou des stagiaires des activités organisées par le secteur extrascolaire. Il sera beaucoup plus difficile de compter sur eux lors des semaines où les écoles maternelles, primaires, secondaires seront fermées, mais que les Hautes écoles et universités seront encore en activité. Certains organismes ont donc décidé d’abaisser de 18 à 16 ans l’âge minimum pour pouvoir être bénévole dans le cadre de leurs activités. Le premier test se fera à l’occasion des vacances d’automne, qui passent à deux semaines, du 24 octobre au 7 novembre. S’il y a un consensus sur le bien-fondé de la mesure, il faut bien constater que les moyens pour l’accompagner ne sont pas à la hauteur de ce que le secteur espérait : en plus de l’augmentation des budgets pour les Centres de vacances et les Écoles de devoirs, l’ONE s’est vu confier la gestion d’un budget annuel d’un million d’euros pour soutenir spécifiquement les opérateurs de l’Accueil temps libre durant les congés d’automne et de détente.

Sur le terrain, c’est toute l’année qui vient sera évidemment une année test et il faut tenir compte du fait que la réforme intervient dans un climat d’épuisement des équipes, qui ont été mises à rude épreuve par le Covid.

P.J. : Au-delà des rythmes annuels, ne faudrait-il pas également procéder à une réforme des rythmes quotidiens de l’école ?

Disons que s’il a fallu trente ans pour passer des preuves scientifiques à la décision politique pour ce qui concerne la transformation du calendrier annuel, on peut supposer que la transformation du rythme quotidien n’ira pas beaucoup plus vite ! Il faudrait en tout cas urgemment augmenter, de manière concertée avec les familles, les temps consacrés aux activités physiques et de détente.

AUTEUR.E.S

Eeman Morgane

Directrice de Badje (Bruxelles Accueil et Développement pour la Jeunesse et l’Enfance), fédération pluraliste d’organisations bruxelloises actives dans le secteur de l’accueil des enfants et des jeunes.

Szoc Edgar

Rédacteur en chef.