Biblio : Evaluer: sortir du couperet

octobre 2024

COLMAN, C., BLOMME, E., NICAISE, P., VANDER LAENEN, F., DECORTE, T., GODDERIS, L., MAKOLA, V., DE PAU, M. & LAMBRECHTS, M-C. An evaluation of the Belgian Drug Policy,

Science Policy Office, 2021.

Financée par BELSPO et conduite par plusieurs universités belges, l’étude EVADRUG (2018–2021constitue la première évaluation structurée de la politique belge en matière de drogues. Elle s’est attachée à comprendre comment les interventions dans les domaines de la prévention, des soins, de la réduction des risques et des poursuites pénales sont conçues, mises en œuvre et articulées entre elles. À l’aide de modèles logiques, d’enquêtes, d’entretiens et d’analyses documentaires, elle met en évidence une fragmentation persistante des politiques, une coordination insuffisante entre niveaux de pouvoir et une faible capacité de pilotage. L’écart important entre les intentions affichées dans les textes stratégiques et la réalité de terrain, souvent marquée par des logiques institutionnelles cloisonnées, est fortement mise en évidence. Si certaines avancées vers une approche intégrée ont été relevées depuis les années 2000, elles restent incomplètes. L’étude souligne l’absence d’un monitoring cohérent, le manque d’indicateurs partagés et l’insuffisance des évaluations systématiques. EVADRUG recommande de renforcer la coordination politique et administrative, d’institutionnaliser l’évaluation et de développer des instruments de suivi adaptés, afin de permettre une politique plus cohérente, plus transparente et mieux adaptée aux besoins concrets des publics concernés.

Bernard PERRET, L’évaluation des politiques publiques, La Découverte, 2014

Dans L’évaluation des politiques publiques, Bernard Perret propose une réflexion sur les enjeux épistémologiques, méthodologiques et politiques de l’évaluation dans l’action publique. Refusant les approches purement technocratiques ou gestionnaires, il plaide pour une évaluation « délibérative » et « compréhensive », capable de prendre en compte les intentions, les effets mais aussi les significations sociales des politiques. Loin d’une simple mesure d’impact, l’évaluation devient un instrument de compréhension et de débat démocratique. Perret insiste sur la nécessité de croiser les méthodes quantitatives et qualitatives, d’ancrer l’analyse dans les contextes concrets et de donner une place centrale aux acteurs concernés. Cette approche résonne particulièrement dans le champ de la santé publique et de la réduction des risques : comment, au-delà des chiffres, rendre compte des transformations ?

Le guide Evaluating Drug Policy de l’EMCDDA (désormais EUDA) propose une méthode en 7 étapes pour planifier et piloter l’évaluation des politiques en matière de drogues. Il vise les décideur·euses et gestionnaires, en insistant sur la souplesse, la pertinence contextuelle et l’importance de l’intégration de l’évaluation dans le cycle des politiques publiques. L’étape 1 souligne la nécessité d’un engagement politique fort, de ressources suffisantes et de l’implication des parties prenantes. L’étape 2 invite à choisir entre une évaluation globale ou ciblée, à différents moments du cycle (ex ante, en cours, ex post). L’étape 3 porte sur le choix de l’équipe (interne, externe ou mixte), combinant expertise technique et connaissance du contexte. L’étape 4 consiste à définir des questions évaluatives SMART (Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste et Temporellement défini) et à choisir des méthodes adaptées. L’étape 5 propose de construire des modèles logiques pour articuler inputs, activités, résultats et impacts, et identifier les données nécessaires. L’étape 6 recommande d’assurer un suivi actif de l’évaluation, notamment en facilitant l’accès aux données. Enfin, l’étape 7 rappelle que les résultats doivent être diffusés, traduits en actions, et nourrir une culture d’évaluation continue.